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Deux tentatives d’interception de migrants en mer par les forces de l’ordre marocaines et espagnoles ont conduit à la noyade de plusieurs personnes et à l’arrestation et au refoulement violents de dizaines de rescapés.
Citant des informations de la MAP, le quotidien Al Massae rapportait dans son édition du 5-6 novembre 2011 le refoulement par les autorités marocaines, le 25 octobre, de 90 personnes et le 3 novembre, de 60 personnes qui tentaient de passer à Sebta (Ceuta) par la mer.
Les nombreux témoignages recueillis par le GADEM permettent d’affirmer que leurs interceptions en mer alors qu’ils cherchaient à rejoindre Sebta ont été particulièrement violentes, et dans certains cas mortelles. Ces opérations ont donné lieu à des violences disproportionnées et à de nombreuses exactions. D’autres événements similaires antérieurs et plus récents retracent le même type de pratiques par les autorités marocaines et/ou espagnoles qui portent une atteinte grave au droit à la vie de ces personnes.
Les 90 personnes refoulées le 25 octobre à la frontière algérienne sont les rescapés d’un naufrage provoqué suite à l’intervention conjointe des forces de sécurité espagnoles et marocaines pour intercepter leur embarcation qui tentait de contourner par la mer le grillage installé sur la côte entre Fnidq et Sebta. Si certains migrants ont réussi à rejoindre le territoire sous contrôle espagnol, 10 à 15 personnes seraient mortes noyées, selon des témoignages concordants.
Le 3 novembre, 74 personnes, ressortissants de différents pays d’Afrique subsaharienne [1] ont tenté de rejoindre Sebta à la nage. Ils ont été rattrapés par les bateaux de la marine marocaine, alors que des tirs de balles en caoutchouc de la Guardia civil retardaient leur progression et que des civils marocains, apparemment incités par les forces de l’ordre marocaine, leur jetaient des pierres depuis le rivage. Seules 13 personnes ont pu rejoindre les eaux jouxtant Sebta. Les trois premières arrivées ont été immédiatement remises par la Guardia civil aux forces auxiliaires marocaines, qui ont cependant refusé de reprendre les 10 autres migrants.
Les migrants interviewés par le GADEM, accusent des hommes en uniforme qui leur semblaient être des militaires marocain de les avoir frappés et d’avoir enfoncé la tête de certains sous l’eau jusqu’à la limite de la noyade avant de les ramener à terre, où ils les auraient dépouillés de leur argent et téléphones portables.
Après avoir été emmenés dans différents commissariats des environs puis regroupés dans celui de Tetouan, ils ont été transportés en bus vers le commissariats d’Oujda puis finalement refoulés à la frontière avec l’Algérie, à l’exception des 5 personnes, séparées du reste du groupe, car elles auraient été gravement blessées lors de l’opération d’arrestation.
Selon les témoignages recueillis, ces pratiques sont récurrentes [2] et accompagnent la chasse aux migrants dans les forêts du nord du Maroc, les destructions régulières des campements où se réfugient les migrants [3] et les violences qui les accompagnent.
Dans un communiqué rendu public le 9 septembre 2011 [4], le GADEM dénonçait une série de rafles opérées contre les migrants subsahariens à Rabat et Nador en réponse à la pression accrue exercée par l’Espagne sur le Maroc. Le GADEM avertissait contre l’intensification de la répression policière annoncée par M. Khalid Zerouali, Responsable de l’immigration et du contrôle des frontières au sein du ministère de l’Intérieur.
Le GADEM considère les exactions commises aux abords de Sebta comme le résultat de la complicité entre les autorités marocaines et espagnoles pour freiner l’entrée des migrants en Europe. Ces agissements violent manifestement différentes des dispositions de la législation marocaine (non-assistance à personne en danger, violences, procédure de reconduite à la frontière, droits de défense, protection contre les violences et les confiscations, etc.) et des Conventions internationales dûment ratifiées par le Maroc.
Ils soulignent également certaines pratiques courantes s’exerçant depuis des années en dehors de tout cadre légal, comme la remise immédiate et collective par les autorités espagnoles aux autorités marocaines de migrants, sans examen de leur situation individuelle ni respect de l’obligation internationale de non refoulement des demandeurs d’asile.
Le GADEM exhorte les autorités marocaines, ainsi que les instances de défense des droits Humains en particulier le Conseil national des Droits de l’Homme (CNDH), à prendre rapidement les mesures nécessaires pour mettre un terme à ces pratiques et pour veiller au respect des droits et de la dignité des étrangers au Maroc. La lumière doit être faite sur les allégations de violences perpétrées par ou en complicité avec les agents de l’Etat à l’encontre de cette population, violences régulièrement dénoncées par le GADEM [5] et d’autres organisations.
1 http://www.e-‐joussour.net/fr/node/10416
2 http://www.popularesenlibertad.es/sitio/noticias/35-‐noticias/165-‐comunicado-‐de-‐populares-‐en-‐libertad.html
3 http://www.elfarodigital.es/melilla/sucesos/50764-‐los-‐conflictos-‐fronterizos-‐de-‐2010-‐provocaron-‐mas-‐presion-‐migratoria.html
4 En août 2010, une série d’affrontements ayant pour conséquence des tensions accrues entre le Maroc et l’Espagne, avait éclatées à la frontière au niveau de Melilla suite à une altercation entre cinq jeunes marocains et des policiers espagnols au moment de leur passage dans l’enclave.
5http://www.elpais.com/articulo/espana/Gobierno/insta/Rabat/frenar/emigracion/irregular/elpepu/20110715elpepinac_14/Tes