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(La note détaillée en pièce jointe)
Il y a 20 ans, le 11 novembre 2003, était adoptée la loi n°02-03 relative à l’entrée et au séjour des étrangers au Royaume du Maroc, à l’émigration et l’immigration irrégulières[1] dans un contexte de lutte contre l’émigration irrégulière vers l’Europe et de préoccupation sécuritaire aux lendemains de l’attentat de Casablanca de mai 2003. Depuis, le Maroc s’est engagé dans une voie de réformes législatives et politiques consécutive à l’adoption, en juillet 2011, de la nouvelle Constitution, et marquée par le lancement, il y a 10 ans, de la Nouvelle politique d’immigration et d’asile (NPIA). 20 ans après, ce vent de réformes n’a pas atteint cette loi malgré les engagements pris en ce sens dans le cadre de la NPIA. Ainsi le nouveau projet de loi[2] sur les migrations annoncé n’a finalement pas été porté à la connaissance de l’ensemble des acteur·rice·s concerné·e·s, et n’a toujours pas été soumis au Parlement.
Dans ce contexte, le GADEM souhaite partager quatre points d’inquiétude en matière de protection des droits, relatives au texte qui reste en vigueur et à son application. Cette analyse se veut ainsi une contribution pour la réforme attendue.
Premièrement, la notion de menace à l’ordre public, qui, malgré son omniprésence dans le texte[3], reste vague et sujette à l’interprétation du/de la juge, pouvant ainsi ouvrir la voie à l’arbitraire et à d’éventuels abus de pouvoir.
Deuxièmement, le droit au recours effectif : alors que le droit commun dispose l’obligation de notification et de motivation[4], en faits et en droit, des décisions administratives, la majorité des situations portées à la connaissance du GADEM font état d’une absence de notification écrite. Dans les rares cas où elles sont consignées par écrit, elles ne sont pas motivées. Les délais de recours limités prévus par la loi, ainsi que ces pratiques de non notification des décisions entravent ainsi le droit à un recours effectif.
Troisièmement, des difficultés importantes liées à l’obtention et au renouvellement d’un titre de séjour persistent et entravent toute possibilité d’intégration socio-économique, qu’elles soient liées aux conditions strictes d’accès prévues par la loi n°02-03 ou à l’interprétation de ses dispositions.
Enfin, la pénalisation de l’émigration, l’immigration et du séjour irréguliers demeurent des préoccupations majeures pour le GADEM. Ainsi, par crainte de sanctions pénales prévue par la loi n°02-03, les personnes peuvent hésiter à se présenter devant les autorités compétentes pour faire valoir leurs droits. Des cas de poursuites pénales à l’encontre de personnes s’étant adressées aux autorités pour portées plaintes ont en effet été signifiés au GADEM. Cette question avait d’ailleurs fait l’objet d’observations finales du Comité sur les droits des travailleurs migrants lors de l’examen des rapports périodiques du Maroc en 2013[5] et en 2023.[6]
La loi n°02-03 prévoit également le délit d’aide à l’émigration irrégulière. Le GADEM est préoccupé par le nombre important de sollicitations reçues depuis 2019 pour accompagner des personnes poursuivies sur cette base, et par la rapidité avec laquelle les procédures sont menées, ne permettant pas d’assurer un droit de défense effectif, ni de respecter les garanties procédurales nécessaires au procès équitable consacré dans Constitution marocaine.
Au regard de ces différents éléments, le GADEM recommande vivement une réforme de la loi n°02-03 comme annoncé dans le cadre de la politique migratoire de 2013, en mettant en avant les points suivants :
Il est souligné que bien que des progrès aient été réalisés dans la gestion des questions migratoires au Maroc, la révision de la législation nationale reste indispensable pour garantir le respect des droits des personnes non ressortissantes marocaines sur le territoire marocain, conformément aux normes des conventions internationales et de la Constitution marocaine.