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La Méditerranée occidentale a besoin d’une gouvernance qui se fonde sur un entendement politique holistique, a affirmé, lundi à Marrakech, le ministre des Affaires Étrangères, de la Coopération Africaine et des Marocains Résidant à l’Etranger, M. Nasser Bourita
« La Méditerranée occidentale a besoin d’une gouvernance qui se fonde sur un entendement politique holistique, pour mettre en œuvre nos politiques nationales, à travers une meilleure coordination, des décisions davantage consensuelles et des actions mieux concertées », a souligné M. Bourita à l’ouverture des travaux de la 8-ème Conférence Ministérielle du Dialogue 5+5 sur la Migration et le Développement.
« S’il est une région qui a besoin d’une gouvernance migratoire, c’est bien la Méditerranée occidentale. Car, prise en étau entre deux routes migratoires, elle concentre le meilleur et le pire de la migration », a-t-il insisté, notant que « la question migratoire dans la région du 5+5 est un écosystème où nous, États de la région, avons besoin de repères, de Cap et d’une gouvernance ».
« Fort de sa politique nationale, de son leadership continental et de son expérience réussie de coopération régionale, la volonté du Maroc est, désormais, de favoriser un consensus bicontinental en matière de migration », a-t-il réaffirmé, relevant que l’ambition du Maroc est que le 5+5 soit le moteur de cet effort, et la locomotive d’une dynamique vertueuse de la migration ».
« Notre ambition est que cette conférence serve de plateforme pour un agenda positif de mesures, s’inspirant de quelques principes consensuels du Pacte de Marrakech, déclinés à l’échelle de notre région », a-t-il indiqué.
Selon le ministre, ce Pacte – qui n’a pas fait l’unanimité au sein même du 5+5 – n’est pas une création ex-nihilo. « Nous avons contribué à asseoir certains de ses principes, qui recoupent nos propres positions nationales, a-t-il ajouté.
« Il ne s’agit, donc, pas d’importer des principes exogènes, mais de s’inspirer de ceux qui nous arrangent. Lorsque tout n’est pas à prendre, tout n’est pas à jeter non plus », a-t-il fait observer.
Dans ce sens, M. Bourita a relevé qu’il n’est pas question, non plus, de créer des appels d’air pour des flux migratoires accrus, mais de faciliter la gestion des flux ou de créer un « droit à la migration » ou d’avancer vers une ouverture généralisée des frontières, notant que ceci n’est ni dans l’intérêt de l’Europe, ni dans l’intérêt des pays sud-méditerranéens, qui perdent un talent avec chaque migrant qui quitte son pays ». Il a, par ailleurs, mis en avant la politique humaniste du Royaume en matière de migration qui est en parfaite adéquation avec l’objectif d’une migration sûre, ordonnée et régulière. Et M. Bourita de poursuivre que cette politique s’emploie à lutter contre les réseaux de trafic d’êtres humains, en permettant notamment de démanteler plus de 208 réseaux de trafic illicite de migrants, de secourir en mer quelques 20.000 migrants, par la Marine Royale Marocaine et de mettre en échec près 75.000 tentatives d’émigration irrégulière. D’autre part, « elle s’emploie à déployer une coopération exemplaire avec les partenaires directs. Je pense, notamment, à l’Espagne, avec laquelle la coordination tous azimuts a permis de baisser de 60% les tentatives d’immigration irrégulière, sauvant des milliers de vies en mer », a-t-il fait savoir.
Enfin, la politique migratoire du Maroc prévoit, aussi, un ensemble de mesures qui valorisent la migration ordonnée : Elle met, ainsi, en place des opérations de régularisation, dont bénéficient des migrants en situation irrégulière (50.000), elle intègre le nexus migration-développement et elle permet l’accès des migrants à l’éducation, au travail et à la santé, contribuant à leur intégration, a précisé M. Bourita.
C’est, d’ailleurs, la réussite de cette approche nationale qui a conduit les pays africains frères à confier à Sa Majesté le Roi Mohammed VI, le mandat de « Leader sur la question migratoire », a-t-il relevé.
L’action de SM le Roi, notamment dans le cadre de l’Agenda Africain pour la Migration, œuvre en faveur de la démystification du phénomène migratoire, au moment où les stéréotypes autour des migrants africains demeurent un lieu commun universel, a-t-il conclu.
Par ailleurs,M. Nasser Bourita a aussi affirmé que sans un consensus politique structurant, la coopération opérationnelle restera un « traitement symptomatique ».
Sans un consensus politique structurant, la coopération opérationnelle, aussi importante soit-elle, restera un « traitement symptomatique », appliqué à un cercle vicieux où l’on continuera, indéfiniment, à refouler et réadmettre des personnes, qui se feront aussitôt suppléer par d’autres, lorsqu’elles ne reviendront pas elles-mêmes, a souligné M. Bourita à l’ouverture des travaux de la 8-ème Conférence Ministérielle du Dialogue 5+5 sur la Migration et le Développement.
« Sans ce consensus politique structurant, la coopération opérationnelle n’aurait pas suffisamment de hauteur sur nos propres réalités et sur les dynamiques mondiales. Elle ne pourrait pas, non plus, intégrer la « dimension développement » qui, elle, est réellement décisive pour avancer vers une gouvernance migratoire à même de prendre en charge, aussi, les causes profondes de la migration », a-t-il insisté.
C’est dans ce sens, que SM le Roi Mohammed VI a souligné, en décembre 2018, que « La question de la sécurité ne peut pas davantage faire l’économie de politiques de développement socio- économique, tournées vers la résorption des causes profondes des migrations précaires. [Enfin] la question de la sécurité ne peut pas nier la mobilité. Mais elle peut la transformer en un levier de développement durable, au moment où la Communauté internationale s’emploie à mettre en œuvre l’Agenda 2030 », a rappelé le ministre.
« Si notre région accueille certaines des coopérations les plus anciennes et les plus denses en matière migratoire (une quinzaine d’accords de réadmission notamment), cette coopération reste à refonder sur un consensus politique structurant », a ajouté M. Bourita.
« Notre groupement est un véritable laboratoire du phénomène migratoire : Il regroupe à la fois des pays d’origine, de transit et de destination, et des pays qui ont connu récemment le passage de l’un à l’autre de ces statuts. De même, il concentre une palette de politiques nationales, pas toujours cohérentes les unes avec les autres; parfois même divergentes », a-t-il fait observer.
Selon M. Bourita, ces divergences ne suivent aucune fracture, elles sont Nord-Sud, Nord-Nord et Sud-Sud. « Au Nord comme au Sud, nous nous retrouvons parfois en rapprochement objectif avec des partenaires de l’autre rive, davantage qu’avec des pays de notre propre espace géographique », a-t-il relevé.
Dans ce sens, il a indiqué que la rencontre d’aujourd’hui n’est, toutefois, pas simplement une « énième » conférence sur la migration. Elle aspire à dépassionner le débat et à le reposer dans des termes nouveaux : Car d’abord, la crise n’est plus migratoire, mais davantage liée au divergences sur les politiques migratoires, ajoutant que la réduction du nombre d’arrivées vers l’Europe ne se traduit pas par une diminution proportionnelle du nombre de morts en Méditerranée, aussi les routes migratoires se déplacent, et la fermeture d’une route clandestine ici, entraînante l’ouverture d’une autre ailleurs.
Dans la même veine, le ministre a souligné qu’il était, donc, grand temps de tenir cette ministérielle, qui consacre la place que la migration occupe en Méditerranée occidentale, autant qu’elle démontre la pertinence du groupement pour traiter de cette question.
Il a, toutefois, rappelé que la ville de Marrakech a accueilli, sous le double sceau de la mobilisation collective et de la responsabilité partagée, l’adoption historique du Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, en décembre 2018 et a abrité également en mai 2018, la 5ème Conférence Ministérielle Euro- Africaine sur la Migration et le Développement, dit Processus de Rabat.
Les travaux de la 8-ème Conférence Ministérielle du Dialogue 5+5 sur la Migration et le Développement se sont ouverts, lundi à Marrakech, en présence des ministres des Affaires Étrangères des pays de la Méditerranée Occidentale, ainsi que des représentants des organisations internationales et régionales (OIM, UA, UE, UpM, UMA, CEDEAO, OCDE).
Présidée par le Royaume du Maroc, cette 8è Conférence vise à définir un cadre d’action global, consensuel et équilibré en Méditerranée Occidentale portant sur la question migratoire dans ses différentes dimensions, notamment le lien entre la migration et le développement, la migration régulière et la mobilité, l’intégration des migrants et la préservation de leurs droits, ainsi que la lutte contre le trafic des migrants et la traite des êtres humains.
Une bonne gouvernance de la migration à l’échelle sous-régionale et régionale repose sur une coopération et une coordination politique étroites entre les pays du Dialogue 5+5 autour d’un projet : celui de la création d’un espace de gestion humaine et ordonnée des flux migratoires fondé sur la responsabilité partagée.
C’est dans ce cadre que cette conférence ministérielle ambitionne aussi d’initier une approche consensuelle des questions migratoires à travers la recherche de convergences au sujet de l’interdépendance entre la migration et le développement. Cette démarche devrait se fonder sur une réflexion commune des États du Dialogue 5+5, l’identification des actions conjointes réalistes et réalisables ainsi qu’une véritable coopération dans les différents domaines liés à la migration.