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GADEM sur recommandations CNDH

Le GADEM tient d’abord à remercier le Comité pour la qualité de son travail attestée par la pertinence des questions posées par les experts à la délégation marocaine lors de sa 236ème séance.

Le GADEM salue le travail du Conseil national des droits de l’homme (CNDH) et prend acte de ses recommandations, qui confirment les constats faits par les organisations de la société civile et constituent une base crédible pour la définition d’une nouvelle politique migratoire au Maroc.

 

Pour autant, le GADEM tient à attirer l’attention des experts du Comité sur certains points figurant dans les recommandations du CNDH.

 

Sur un plan général, le GADEM estime qu’il est impératif de dissocier radicalement la politique migratoire et la politique de lutte contre la traite des personnes. La traite touche autant les ressortissants marocains que les étrangers, tant sur le territoire national qu’à l’étranger. La lutte contre la traite des êtres humains est une problématique à part entière qui ne saurait être subordonnée, voire instrumentalisée dans le cadre d’une politique migratoire criminalisant les migrants. Elle nécessite une politique centrée sur la protection des victimes, en commençant par :

 

  • élaborer et imposer le respect d’un véritable protocole d’identification des victimes ;
  • donner un statut légal aux victimes de traite sans conditionner ce statut par la dénonciation des trafiquants ;
  • s’assurer de l’application des principes directeurs du HCR sur l’application de la définition de réfugié aux personnes victimes de la traite ou risquant de l’être ;
  • amender les dispositions du Code pénal criminalisant la prostitution et l’avortement afin d’inclure des dispositions protectrices des droits des victimes.

 

Par ailleurs, en plus des modifications de divers textes de droit interne proposées par le CNDH, le GADEM estime qu’il est impératif de modifier d’autres dispositions du droit interne, directement contraires aux stipulations de la convention, notamment :

  • l’article 50 de la loi n° 02-03, en ce qu’il est directement contraire à l’article 8 de la Convention ;
  • l’article 516 du code du travail, en ce qu’il est directement contraire à l’article 52.3.b de la Convention ;
  • l’article 39-4 de la Moudawana, en ce qu’il est directement contraire à l’article 12.2 de la Convention.

 

Concernant les demandeurs d’asile et les réfugiés, le GADEM estime que :

  • plutôt que de se lancer dans l’élaboration d’une nouvelle loi sur l’asile, dans un contexte d’embouteillage législatif, le Maroc devrait simplement appliquer les textes actuellement en vigueur, et toujours pertinents, à savoir le dahir n° 1-57-271 du 26 août 1957 et son décret d’application n° 2-57-1256 du 29 août 1957 (B.O. n° 2341 du 6 septembre 1957).
  • la possibilité de demander l’asile à l’arrivée sur le territoire marocain ne doit pas conduire à bloquer l’entrée des demandeurs sur le territoire, le temps d’un examen superficiel de leur demande suivi de leur refoulement, ce qui, au lieu de garantir le respect du principe de non-refoulement, favoriserait au contraire la généralisation de sa violation. Les autorités marocaines doivent permettre aux personnes dont la demande d’asile aura été enregistrée à la frontière d’accéder à l’organisme chargé de l’examiner, conformément aux dispositions du droit national.

 

Concernant la régularisation des étrangers en situation administrative irrégulière, le GADEM estime que :

  • le Maroc doit commencer par lever les entraves qui limitent l’accès à un titre de séjour pour certains migrants qui réunissent pourtant les conditions exigibles pour en bénéficier ;
  • les critères de régularisation doivent être les plus inclusifs possibles, seul moyen de « solder » les conséquences de l’actuelle gestion sécuritaire des migrations ;
  • les modes de preuves, notamment de l’ancienneté du séjour sur le territoire, doivent être adaptés à la réalité d’une population confrontée à l’impossibilité d’obtenir des documents administratifs, sans quoi les personnes concernées ne pourront pas prouver la durée de leur présence sur le territoire.

 

En plus de « garantir aux migrants irréguliers en cas d’arrestation, de mise en détention provisoire ou de jugement l’accès effectif à la justice (accès à des avocats et des interprètes compétents, accès aux autorités consulaires, accès aux procédures d’asile, accès aux soins, etc.) », le GADEM estime qu’il faut garantir et faciliter l’enregistrement par la police des plaintes déposées par les migrants, quelque soient leur origine et leur situation administrative.

 

En plus de « Bannir toute forme de violence exercée contre les migrants en situation irrégulière lors des opérations d’interpellation », le GADEM estime qu’il faut également bannir les arrestations au faciès, les expulsions collectives, les refoulements aux frontières de pays où les personnes ne sont pas légalement admissibles, les vols ou la destruction d’effets personnels et la confiscation ou la destruction des passeports et autres documents administratifs.

 

Le GADEM estime que le Maroc prouverait sa volonté de changement de cap en diligentant immédiatement des enquêtes sérieuses, indépendantes et impartiales sur les allégations de violences policières, notamment :

  • le viol de Tina, ressortissante ivoirienne de 16 ans, par des membres des forces auxiliaires après son arrestation à Tanger, le 1er août 2013,
  • la mort d’Alex Toussaint, ressortissant congolais, jeté du bus qui le conduisait à la frontière algérienne par un membre des forces de l’ordre, à la suite de son arrestation lors d’une rafle à Tanger, le 30 juillet 2013,
  • la mort de Clément, ressortissant camerounais, le 16 mars 2013 dans la forêt de Gourougou après avoir été frappé par des membres de la guardia civil puis des forces auxiliaires le 11 mars dans une tentative de franchissement de la frontière de Melilla,
  • la mort de Papy, ressortissant camerounais tombé dans un ravin alors qu’il était poursuivi par les forces de l’ordre dans la forêt de Gourougou près de Nador en février 2013.

 

Le GADEM demande également que toute la lumière soit faite sur les circonstances de la mort d’Ismaïla Faye, ressortissant sénégalais poignardé le 12 août 2013 par un militaire pour avoir refusé de laisser sa place dans un bus au motif, selon les témoins, qu’un noir ne saurait s’asseoir à côté d’une marocaine.

 

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Tags : Communiqué de Presse GADEM