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Un début d’année 2023 marqué au fer rouge des discriminations raciales
Lancement de la campagne digitale 2023 #semaine_contre_discriminations
Discours d’incitation à la haine raciale sur les réseaux sociaux, stigmatisation et rejet des personnes noires étrangères au Maroc, propos et violences racistes particulièrement virulentes en Tunisie… ce début d’année 2023 a été fortement marqué par un contexte lourd. Le GADEM s’inquiète de la situation actuelle, et appelle à des actions concrètes et à un véritable débat démocratique, ouvert et franc sur ces questions à l’occasion de cette nouvelle Journée internationale de lutte contre toutes les formes de discriminations raciales.
Début janvier 2023, des résidant·e·s du quartier d’Oulad Ziane à Casablanca ont manifesté contre l’existence du campement de fortune près de la gare routière abritant des personnes migrantes. Ces protestations ont donné lieu à des opérations musclées d’évacuation, à des altercations entre habitant·e·s de ce campement et membres des forces de l’ordre, ainsi qu’à des heurts avec des riverain·e·s. Les actions organisées à l’encontre des personnes étrangères résidant dans ce campement sont l’expression d’un ras le bol face à cette situation qui perdure. En effet, comme cela a été rappelé par certains médias, ces campements sont le fruit des déplacements forcés à l’intérieur du territoire marocain depuis les zones frontalières vers d’autres villes plus éloignées. Cette pratique, mise en œuvre depuis fin 2013 et qui n’est cadrée par aucune disposition législative, vise à éloigner des frontières européennes toutes personnes noires étrangères, couramment associées à l’émigration irrégulière. Cependant, si l’émergence de ces campements est clairement le résultat de ces pratiques, les pouvoirs publics laissent la situation sur place se détériorer et la plupart des actions ciblant des personnes étrangères, principalement sur la base de leur couleur de peau, donne lieu à un déferlement de discours racistes sur les réseaux sociaux.
En février 2023, une campagne digitale prônant l’interdiction du mariage entre ressortissantes marocaines et « Subsahariens et autres citoyens de pays africains de couleur »[1] est devenue virale. Cette campagne à caractère raciste prône une forme de hiérarchisation entre différents groupes raciaux, ici les personnes noires étrangères perçues comme pouvant porter atteinte à l’identité et à « la beauté marocaine »[2]. Ce type de propos racistes interpellent à plusieurs titres, premièrement, car ils appellent au rejet et à la marginalisation, ensuite parce qu’ils occultent une réalité marocaine et offensent non seulement les personnes noires étrangères, mais également marocaines, et enfin, parce qu’ils font tristement écho aux événements les plus tristes de l’Histoire. Ils sont tout simplement aujourd’hui inacceptables.
Si ce n’est au travers du #piqurederappel, le GADEM a jusque-là choisi de ne pas réagir à ces élans racistes et identitaires sur les réseaux sociaux proclamés par des groupes reprenant des propos généralement associés à des mouvements d’extrême droite en France et plus généralement, en Europe. Même si la question légitime de la manipulation a été soulevée par certain·e·s observateur·rice·s, la réalité reste pourtant inquiétante dans un contexte économique instable marqué par une inflation importante, et ce déferlement de propos haineux est alarmant, notamment lorsqu’on observe le cas de la Tunisie dans laquelle le 21 février, le plus haut niveau de l’Etat a repris ses propos à son compte donnant lieu, par la suite, non seulement à une forme de lynchage virtuel, mais aussi à de véritables actions et mesures racistes à l’encontre des personnes noires étrangères.
Le 2 mars 2023, le porte-parole du gouvernement marocain, Mustapha Baitas, a déclaré lors d’un point presse tenu à la suite d’un conseil du gouvernement : « le Maroc, pays leader en matière d’accueil et d’intégration des immigrés, a rompu avec toutes les formes de haine et de discrimination raciale conformément aux dispositions de la Constitution et aux conventions internationales ratifiées »[3]. Au regard des événements depuis le début de l’année 2023 et des arrestations au faciès qui continuent d’être régulièrement opérées dans les principales villes du Maroc, notamment à Rabat, force est de constater que si l’engagement du Maroc pour rompre avec de vieilles haines intestines est sincère, la réalité – 10 ans après le lancement de la nouvelle politique de 2013 – est tout autre et rappelle à l’ordre. Le Maroc doit se doter des outils législatifs et institutionnels nécessaires et adéquates pour protéger efficacement et faire valoir les droits à réparation et au recours à toute personne victime de discriminations raciales.
Afin de contribuer à un débat public nécessaire sur les questions de discriminations raciales dans le contexte actuel, le GADEM lance sa semaine de lutte contre les discriminations raciales sous le hashtag #semaine_contre_discriminations, une campagne digitale qui aura lieu sur les réseaux sociaux du 21 au 25 mars 2023.
[1] https://www.lopinion.ma/Des-mariages-a-ranger_a37073.html
[2] Ibid
[3] http://www.mapexpress.ma/actualite/activite-gouvernementale/migration-maroc-rompu-toutes-les-formes-haine-discrimination-m-baitas/