La Commission européenne va débloquer près de 127 millions d’euros dans les semaines à venir pour soutenir l’économie fragile de la Tunisie et freiner les départs irréguliers de migrants.
Ces déboursements interviennent dans un contexte de pression politique croissante de la part du gouvernement italien qui s’efforce de gérer un nouvel afflux de demandeurs d’asile sur l’île de Lampedusa.
Plus de 10 000 migrants sont arrivés en quelques jours de Tunisie sur la petite île. La Première ministre italienne, Giorgia Meloni, et de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, se sont rendues sur place dimanche.
Au cours de cette visite, la responsable allemande a dévoilé un plan d’action en dix points et s’est engagée à accélérer le versement des fonds prévus dans le cadre du protocole d’accord controversé signé en juillet avec Tunis.
L’annonce de vendredi est donc la suite de l’engagement de la présidente de la Commission.
La nouvelle enveloppe est divisée en deux volets : 60 millions d’euros pour l’aide budgétaire et près de 67 millions d’euros pour l’aide à la migration.
La part consacrée au budget tunisien sera directement envoyée au Trésor tunisien dans le but d’éviter un effondrement financier du pays en crise. La Commission craint que le scénario d’un écroulement pousserait un plus grand nombre de migrants vers les côtes européennes.
Par ailleurs, l’enveloppe de 67 millions d’euros destinée à l’immigration combine deux sources :
• 24,7 millions d’euros provenant d’un instrument financier adopté en 2022
• 42 millions d’euros provenant de l’enveloppe de 105 millions d’euros incluse dans le mémorandum d’entente pour lutter contre les passeurs, renforcer la gestion des frontières et accélérer le retour des demandeurs d’asile dont la demande a été rejetée.
Les 67 millions d’euros seront répartis entre les garde-côtes et la marine tunisienne, qui recevront des navires de recherche et de sauvetage, des caméras thermiques, des radars et d’autres équipements de surveillance. Les organisations humanitaires, telles que l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et l’Agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR) percevront aussi ces fonds.
« Nous aurons différents partenaires de mise en œuvre« , a déclaré une porte-parole de la Commission vendredi après-midi, « les contrats sont en cours d’élaboration« .
Depuis sa signature, le memorandum d’entente UE-Tunisie est devenu la cible de fortes critiques et d’un examen minutieux de la part des médias, avec une attention particulière sur les droits fondamentaux.
La Tunisie est accusée de violations des droits de l’homme et d’expulsions collectives de migrants dont certains ont été retrouvés abandonnés au milieu du désert, près de la frontière libyenne.
Le président tunisien, Kaïs Saïed, a également tenu des propos racistes à propos des demandeurs d’asile venus d’Afrique subsaharienne. Il a dénoncé ce qu’il appelle un « plan criminel visant à modifier la composition du paysage démographique de la Tunisie« . Ces propos font écho à la théorie du complot d’extrême droite connue sous le nom de grand remplacement.
La médiatrice européenne a formellement demandé la semaine dernière à la Commission de clarifier comment l’accord garantira le respect des droits fondamentaux par les forces tunisiennes lors de leurs opérations pour réduire les flux migratoires irréguliers.
« Dans le cadre du (mémorandum), l’UE et la Tunisie ont accepté de coopérer dans le plein respect des principes du droit international et du respect de la dignité des migrants« , a précisé la porte-parole de la Commission lorsqu’elle a été interrogée sur les garanties financières.
« Les contrats vont maintenant être signés. Mais, d’une manière générale, les contrats de l’UE comportent toujours des clauses normatives en matière de droits de l’homme« .
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