C’est la dernière décision de l’Espagne pour faire face aux nombreuses arrivées de migrants aux Canaries. Dès la deuxième semaine du mois de novembre, près de 11 000 places vont être libérées dans des hôtels et des casernes du pays pour héberger les exilés récemment débarqués dans l’archipel.
Quatre casernes militaires désaffectées seront prêtées par le ministère de la Défense à Madrid, Alcalá de Henares, Séville et Carthagène, et pourront accueillir environ 4 000 personnes, détaille El Pais. Quatre mille places encore seront réservées dans des hôtels – qui ont accueillis les déplacés ukrainiens après l’offensive russe en 2022 – et 3 000 autres dans des centres d’accueil et des foyers de toute la péninsule ibérique.
Une fois accueillis dans ces structures, les personnes hébergées ne pourront y rester qu’un mois maximum. Leur prise en charge sera opérée par des ONG, avec l’aide financière de l’État. Objectif ? « Garantir que les nouveaux arrivants ne se retrouvent pas à la rue et aient la possibilité de chercher des alternatives », explique le journal.
Ces hébergements supplémentaires permettront aussi au gouvernement de maintenir le rythme des transferts depuis l’archipel. Après une visite sur l’île d’El Hierro le 19 octobre, le ministre des Migrations José Luis Escriva a promis que les transferts en avion des exilés vers l’Espagne continentale soient plus nombreux et plus fréquents : le ministre s’est engagé à ce qu’il n’y ait pas plus de 6 000 migrants en même temps dans les îles Canaries.
Ces derniers jours, des hébergements supplémentaires avaient déjà été ouverts pour faire face aux arrivées : le centre thermal en travaux de Medina del Campo accueille actuellement 150 personnes et un foyer d’Almeria, 321 exilés.
« Manque de coordination »
L’arrivée des migrants dans la péninsule a fait grincer des dents certains élus locaux, qui reprochent à José Luis Escriva de ne pas les avoir prévenus. Le porte-parole du gouvernement andalou et ancien maire d’Almeria, Ramón Fernández-Pacheco, a reproché au gouvernement d’agir « unilatéralement » et « sans coopération » avec les municipalités et les communautés autonomes. La présidente de la région d’Estrémadure, à l’ouest de l’Espagne, a critiqué le « manque de coordination » sur cette question. « Cela s’appelle du respect et de la loyauté institutionnelle et c’est ce que nous demandons », a-t-elle souligné.
Salvador Escudero, conseiller municipal du Parti populaire (PP) de Torrox près de Málaga, où sont hébergés plus de 200 migrants, a proposé d’établir un mécanisme de « contrôle » des migrants. « À moins qu’on ne les marque comme les animaux, avec un bracelet ou quelque chose comme ça, je ne vois pas comment on pourra contrôler les déplacements de ces ‘créatures’ qui vont se promener ici dans un mois », a-t-il déclaré à la radio municipale. Des propos qui ont poussé le parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) à réclamer sa démission.
ose Luis Escriva, lui a tenu à temporiser, en rappelant à la télévision que l’Espagne avait toutes les capacités d’héberger les exilés, ayant accueilli après l’offensive russe plus de 200 000 Ukrainiens. « La différence, cette fois-ci, c’est la xénophobie exprimée par certains », a-t-il déclaré.
Arrivées record
Ces dernières semaines, l’archipel fait face à des arrivées record. Pendant les deux premières semaines d’octobre, 8 561 migrants ont débarqué aux Canaries, un chiffre record selon les médias espagnols, depuis une précédente crise migratoire en 2006. Et entre le 1er janvier et le 15 octobre, plus de 23 500 migrants au total ont atteint l’archipel, soit près de 80% de plus que sur la même période l’année dernière, selon le ministère de l’Intérieur espagnol.
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Si des milliers de migrants parviennent sans encombre sur les îles Canaries, d’autres, en revanche, n’atteignent jamais ses côtes. Sur cette route migratoire en plein océan Atlantique, les naufrages sont nombreux. Jeudi 26 octobre, deux personnes ont été retrouvées mortes à bord d’une embarcation au large de Dakhla, au Sahara occidental. Le bateau, secouru par les autorités marocaines transportait au total 274 migrants, dont une majorité de Sénégalais. Leur pirogue, interceptée à 290 km au sud de Dakhla, était partie six jours plus tôt des côtes sénégalaises pour rejoindre clandestinement les îles Canaries, selon une source militaire citée par l’agence de presse marocaine MAP.
Lundi, la marine marocaine avait déjà repêché trois corps de migrants et porté secours à 189 autres, tous Sénégalais, alors qu’ils étaient à bord de deux embarcations « en difficulté » dans la même zone. Les cadavres ont été emmenés à la morgue de l’hôpital de Dakhla.
D’autres corps de migrants gisent dans le cimetière du petit village d’Agüimes, sur l’île de Grande Canarie. Les niches funéraires 3.326 à 3.340 renferment les corps de 15 migrants retrouvés en mer il y a trois ans à bord d’un bateau sans aucun survivant, a pu constater l’AFP. Un bouquet de fleurs violettes illumine un mur blanc. D’après le fossoyeur du cimetière Bartolomé Gómez, « des dames viennent fleurir leurs niches », car « ils n’ont personne pour le faire ».
